De 2018 à 2020, Christian Sebille, compositeur et artiste sonore, a été invité en résidence par le Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques – Cirva. Le centre d’art du quartier de la Joliette est internationalement réputé pour les collaborations qu’il engage entre artisan·e·s verrier·ère·s et artistes. Par nature orientée vers la création de formes plastiques (Pierre Huyghe, François Morellet, Pierre Soulages…), la collaboration a pris ici un tour inédit en investissant le verre comme objet sonore.
Après une recherche sur les formes et leurs signatures acoustiques – ballons, vasques, cymbales, soucoupes ou tiges… brisées, à cloche, creuses ou sablées… – Christian Sebille a développé un projet d’orchestre de verre et d’installation sonore immersive. Dans cette recherche, le verre est à la fois instrument et membrane de diffusion acoustique. Chaque forme soufflée, par définition unique, libère une onde sonore singulière, mise en boucle, transformée et propagée par des haut-parleurs de verre.
La création a été présentée au public sous la double forme d’une pièce électronique jouée en performance par Christian Sebille en compagnie du percussionniste Philippe Foch, musicien protéiforme et subtil, et d’une installation immersive agie par mécanique générative.
Paysage de propagations réunit une équipe pluridisciplinaire : souffleurs de verre, philosophe, compositeur, musiciens, concepteurs de mécaniques et réalisateur en informatique musicale.
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Lors de ma vie de compositeur, les idées que j’ai développées ont souvent trouvé leur profondeur grâce à la réalisation de séries.
Les séries « Villes imaginées » (7 pièces pour voix, instruments et électronique) ou « Miniatures » (13 installations musicales et sonores) répondaient déjà à ma volonté de creuser un sillon et d’approfondir une recherche artistique personnelle en déclinant un jeu de différences formelles.
Suivant cette même logique créative, « Paysages de propagation » est devenue une série dont chaque déclinaison comporte un numéro et un sous titre :
> Paysage #0 « Han-naH inside/outside »
Installation plastique d’une pièce équipée d’un transducteur qui diffuse des textes de Hannah Arendt mixés à une improvisation vibraphone (Alex Grillo) et électronique (Christian Sebille)
Présenté dans le cadre de l’exposition « Disobey orders, save the artists » du 30 août 2020 au 30 janvier 2021.
Commande de l’American Gallery à Marseille.
> Paysage #1 « Matrice »
Installation avec vidéo présentée en mai 2021 au Module du GMEM sous sa forme générique : l’exploration d’un orchestre de verre, les formes de verre étant tour à tour productrices de sons et membranes de diffusion des résonances, transformés ou pas ;
« Nous sommes dans un lieu clos où les pièces de verre, réveillées par des mécanismes asservis, propagent leur identité sonore. Les lumières balayent l’espace. Rien ne semble fixe. Dix tables présentent des pièces uniques, inertes, jusqu’à l’action du percuteur. Le souffle des artistes verriers se prolonge par le son. La matière passe du solide au vibrant, du souffle figé à son expansion retentissante. Les sons se propagent dans l’espace, se mélangent entre leurs zones de propagation. Les éclats de lumière et les nappes de couleurs, en contrepoint, brouillent les repères.
Après un temps d’observation, vous déambulez à la recherche des mécanismes. Ogives ou vasques frappées, longues tiges ou cymbales tapées ou frottées, bandes de lumière vibrantes… après le premier étonnement, c’est la recherche de la compréhension du dispositif qui s’impose. D’où viennent les phénomènes ? Puis jaillissent les bulles de spectres lumineux ou sonores, les axes de dialogues et les traces des fréquences. Les jeux entre les familles de sons – bois, métal, pierre – s’interrogent et s’interpellent. Les mouvements des résonances demandent l’immobilité de l’auditeur et son observation.
Vous décidez d’être à l’intérieur du petit monde. Un lien dérisoire et ironique s’installe entre vous et le cosmos. Vous êtes dans un endroit décidé de votre écoute, à un endroit de l’orchestre, proche de ce qui est fort, écarté du lointain. »
2021, Christian Sebille.
> Paysage #2.1 – Performance :
Jeu avec le percussionniste Philippe Foch et dispositif temps réel
Performance à partir de quelques pièces en verre par Philippe Foch (percussions) et Christian Sebille (électronique temps réel).
Lors des deux années à compter de 2018 en résidence au Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques — Cirva, pour développer des pièces soufflées dédiées à la recherche sonore, Christian Sebille n’a pas manqué de profiter de sa complicité avec le percussionniste Philippe Foch. Ils ont engagé ensemble une recherche autour de la résonance des pièces en verre. Les ateliers pendant lesquels ils ont dompté ces instruments inouïs a finalement donné lieu à l’idée d’une performance dans le cycle Paysage de propagations. Philippe Foch use de sa dextérité gestuelle et de sa sensualité pour extraire des sons inédits, pendant que Christian Sebille s’empare de la matière sonore pour la transformer en temps réel et la restituer. Un duo d’improvisation électronique et acoustique qui s’appuie sur la poétique des objets pour prolonger la trajectoire des souffles cristallisés des artistes verriers et créer une petite cosmologie sonore dérisoire et vivante.
> Paysage #2.2 – Performance / installation :
performance prolongée par une installation
> Paysage #3 « Fusion »
Installation avec vidéo. Mise en espace et en image par Francisco Ruiz De Infante (plasticien) ;
« Un espace… Un pré carré mécanique et organique au même temps. Un désir incandescent de maitriser le beau désordre de quelques respirations fossilisées dans des boules transparentes. Le mot « désordre* », pour certains évoque un cauchemar domestique. Il nous convient ; il nous rassure aussi, car tout ordre peut devenir facilement effrayant. L’ordre fait peur parce qu’il nous attire avec la même force que le désordre nous porte. Si nous existons et si un espace vibre, c’est probablement à cause de ces va-et-vient.
Comment construire une archéologie en transition ? Un potentiel fragile qui, amplifié par la résonance de quelques peaux transparentes et quelques souvenirs du feu, puisse composer un espace-temps énigmatique avec lequel vibrer ?
Voilà des formes improbables générées grâce aux désirs du son ! Voilà les marteaux pour provoquer la réaction de l’air fossilisé dans l’air du présent ! Voilà les ombres pour expliciter des mouvements presque invisibles ! Et voilà aussi les scanners pour éclairer, souligner et cacher ces souffles vitrifiés. Et voilà donc ces regards mécaniques qui balaient les transparences et les corps. Ces regards qui, en regardant tout, ne voient rien… pour mieux laisser entendre l’orchestre. » Francisco Ruiz De Infante
*Désordre, de Jean-Claude Carrière, 2012, Éd. André Versaille
> Paysage #4 « Filtres et Résonances »
Pièce pour six voix solistes (Ensemble Les Métaboles), une percussionniste (Multilatérale) et dispositif électronique, diffusée sur vasques en verres sur la base du texte de Christophe Tarkos – Le petit bidon (création 2022).
Paysage #4 s’appuie sur l’analyse spectrale des pièces en verre pour définir un tempérament non tonal qui servira de gamme pour les chanteurs. Ainsi les résonances des un.e.s et des autres se répondent, se frôlent, se combinent, liées par les transformations électroniques.
Un paysage se crée ainsi entre la réalité sonore des verres, leur vibration étendue et les voix articulées.
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EN TOURNÉE :
Paysage de propagations #1 «Matrice»
19 juillet au 29 août 2021 — festival (((Interférence_s))) du Centre Wallonie-Bruxelles/Paris (Paris, 75)
Janvier 2023 — Arsenal – Cité musicale (Metz, 57)
Mai 2023 — festival Propagations, GMEM (Marseille, 13)
Paysage de propagations #2 Performance
8 juillet 2021 — festival (((Interférence_s))) du Centre Wallonie-Bruxelles/Paris (Paris, 75)
24 mars 2022 — festival Electrocution 2022 (Brest, 29)
Paysage de propagations #2.2 Performance / installation
30 mars au 3 avril 2022 — festival Magnifique Avant-Garde (Reims, 51)
Novembre 2022 — festival Instants Fertiles (Saint-Nazaire, 44)
Janvier 2023 — Arsenal – Cité musicale (Metz, 57)
Paysage #3 « Fusion »
1er au 12 juin 2022 — Exposition avec le Cirva — La Criée – Théâtre national de Marseille (Marseille, 13)
Christian Sebille
composition et électronique
Francisco Ruiz de Infante
plasticien
Maxime Lance, Vivien Trelcat et Nicolas Canot
collectif artistique Sonopopée, dispositif mécanique et numérique génératif
Équipe du Cirva
production et réalisation verre
Matthieu Girard
constructeur bois et métal
Benoît Fremaux
assistant contructeur bois
Julien Imatasse, Damien Ripoll
ingénieurs son
> Visite de l'installation en réalité virtuelle
> Cirva
> Développement du dispositif mécanique et informatique : Collectif Sonopopée
Production déléguée
GMEM — Centre national de création musicale et Cirva, Centre International de Recherche sur le Verre et les Arts plastiques
En partenariat avec
Saint-Ex, Culture Numérique - Reims
DÉVELOPPEMENT DES DISPOSITIFS MÉCANIQUES ET INFORMATIQUES
COLLECTIF SONOPOPÉE
Lauréat du dispositif pour la création artistique multimédia et numérique (DICRéAM)
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REMERCIEMENTS
RESO-NANCE & FABLAB LFO
Équipe du Cirva :
Christelle Notelet, ex-responsable d’atelier
Valérie Olléon, technicienne pâte de verre
Fernando Torre, David Veis, Cyrille Rocherieux, souffleurs de verre
Christian Sebille est compositeur et directeur artistique du GMEM à Marseille. Il travaille sur la réalisation d’installations sonores in situ, en particulier dans le cadre d’une série intitulée Miniatures. Le lieu de la captation des sons est lié au lieu de leur diffusion dans un rapport de compression d’espace (réduction de l’espace de diffusion par rapport à l’espace de captation) et réduction temporelle (rapport du temps de captation/le temps de diffusion). Par ailleurs, il travaille sur le son concret et sur la capacité du matériau à être en soi son propre diffuseur (l’objet instrument). Le rayonnement de la matière et le mouvement de l’objet (sonore) jouent l’un de l’autre.
Né en 1966 à Vitoria-Gasteiz (Espagne).
Artiste hors-format, il appartient à une génération dont la sensibilité est marquée par la rencontre et la confrontation des machines audiovisuelles avec les matériaux les plus simples, voire les plus quotidiens. Il jongle sans complexes entre la haute technologie et le bricolage d’urgence pour construire ses installations et ses films. Dans son œuvre, il reconstruit la manière dont fonctionne la mémoire lorsqu’elle nourrit le présent : par saccades pleines d’erreurs d’information, ou comme un torrent d’images qui recommencent sans fin.
Mû par un désir vivace de rencontre et d’exploration, qui non seulement ne s’émousse pas mais semble au contraire s’aiguiser à mesure que le temps passe, Philippe Foch, batteur de formation, gravite depuis 30 ans à l’intérieur d’un territoire sonore intensément mouvant et, rétif à toute forme de routine ou de statu quo, ne cesse de remettre en jeu ses acquis et de réinventer son langage musical. Ce langage, dont un riche attirail percussif constitue le cœur battant, frappe d’emblée par sa tonicité rythmique et par sa vitalité organique : un langage ruminé longuement mais tout entier jaillissant dans l’ici et maintenant. – Jerome Provencal, Mouvement.
Sonopopée est un regroupement d’artistes musiciens, qui se donne pour mission de favoriser l’accès aux technologies sonores et aux nouvelles lutheries numériques. Compositeurs, improvisateurs, et développeurs aussi bien informatiques qu’électroniques, les membres du collectif mettent leurs compétences et leur complémentarité au service de projets artistiques variés. Avec un goût prononcé pour l’échange et la transmission, Sonopopée cherche à favoriser l’émergence de pratiques innovantes par le biais d’ateliers autour d’installations sonores interactives et ludiques, tel De oratore, Memoriff, Stationhair…Depuis 2018, le collectif Sonopopée est hébergé par la pépinière de L’Esad de Reims, dans le cadre du programme DesignR.
Sonopopée est responsable de l’enseignement de la création sonore à l’Esad de Reims.
— www.edukson.org/ sonopopee-et-leducation-au-sonore
Le Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques (Cirva) est un centre d’art qui place la création au cœur de son projet. Occupant une position singulière sur la scène mondiale depuis 1983, il invite des artistes et des designers à travailler une matière précise, le verre, avec une totale liberté. Ils sont accueillis dans l’atelier du Cirva aux côtés d’une équipe de techniciens verriers de très haut niveau avec laquelle débute un dialogue. Cet échange se développe dans le temps, une ressource précieuse que le Cirva cultive en prenant la précaution de ne pas déterminer à l’avance la durée de chaque collaboration. Cet outil offre l’opportunité de mener des expérimentations audacieuses où les chemins sans limite de la pensée rencontrent une matière réputée complexe et imprévisible.
Le Cirva est une association à but non lucratif, reconnue d’intérêt général, qui est accompagnée depuis sa création par le ministère de la Culture / direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur, par la Ville de Marseille, par le conseil régional Sud Paca et par le conseil départemental des Bouches-du-Rhône.
— www.cirva.fr